La loi du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XXIème siècle dite loi Justice 21 a considérablement modifié le divorce par consentement mutuel. A partir du 1er janvier 2017, le divorce par consentement mutuel sortira des tribunaux, les juges aux affaires familiales n’homologueront plus ces accords entre les époux.
Ce divorce si célèbre car tant décrié a été introduit dans le Code civil.
L'article 229-1 du Code civil dispose:
Lorsque les époux s'entendent sur la rupture du mariage et ses effets, ils constatent, assistés chacun par un avocat, leur accord dans une convention prenant la forme d'un acte sous signature privée contresigné par leurs avocats et établi dans les conditions prévues à l'article 1374.
Cette convention est déposée au rang des minutes d'un notaire, qui contrôle le respect des exigences formelles prévues aux 1° à 6° de l'article 229-3. Il s'assure également que le projet de convention n'a pas été signé avant l'expiration du délai de réflexion prévu à l'article 229-4.
Ce dépôt donne ses effets à la convention en lui conférant date certaine et force exécutoire.
Dans seulement deux hypothèses le divorce par consentement mutuel redeviendra "judiciaire" (article 229-2 du Code civil):
- lorsque le mineur informé par ses parents souhaite être entendu
- lorsque un époux ou les deux époux sont placés sous un régime de protection
La loi a été publiée, le décret d'application a été annoncé pour le mois de décembre.
Le Ministre de la Justice publie un communiqué aujourd'hui le 27 décembre 2016 et nous informe que le décret d'application sera publié cette semaine, parions que ce sera le décret du Réveillon de la Saint Sylvestre !
Dans ce communiqué (ou cette publicité ?), le Ministre avoue clairement qu'il délaisse l'ordre public de protection pour des raisons budgétaires et afin que les juges travaillent sur de "vrais dossiers".
Il précise en effet: "Les juges aux affaires familiales pourront ainsi se concentrer sur les divorces contentieux, dont les délais de traitement ont augmenté ces dernières années, alors qu'ils nécessitent une intervention rapide du juge".
Pourtant, les divorces par consentement mutuel ne prenaient pas tant de temps aux juges aux affaires familiales: "Ce type de divorce ne nous prenait qu’une demi-journée chacun tous les deux mois. Si l’on enlève les deux mois d’été, cette réforme ne nous fera gagner que cinq demi-journées d’audience par an." Témoignage d'un juge aux affaires familiales dans l'EST REPUBLICAIN article Allo ? je voudrais un divorce à 50 euros "
Dans ce communiqué, et en attendant le décret de la Saint Sylvestre, le Ministre de la Justice précise le rôle des avocats et du notaire.
Les époux devront obligatoirement se faire conseiller par deux avocats différents.
Les avocats seront chargés de s'assurer:
- du plein consentement, libre et éclairé ; de l'époux qu'ils assistent, à cet effet, ils conseillent les époux quant à l'opportunité de recourir à un divorce par consentement mutuel
- de l'équilibre de la convention et de ce qu'elle préserve les intérêts de leur client
- de ce que les enfants ont été informés par les parents de leur droit à être entendus
- de ce que la convention contient tous les éléments requis par la loi et ne contrevient pas à l'ordre public
- de la transcription du divorce sur les actes d'état civil avec l'attestation qui sera remise par le notaire
Le notaire quant à lui est chargé de l'enregistrement de l'acte. Le divorce prendra effet au jour de l'acte de dépôt.
Il est bien précisé: " Dans le cadre de cet enregistrement, le notaire ne remplace pas le juge, il en contrôle pas le consentement des parties ni l'équilibre de la convention, ces missions étant assurées par les avocats. Ni les parties, ni les avocats ne se présentent devant lui. Le notaire vérifie en revanche le respect des mentions obligatoires, les signatures et le respect du délai de rétractation de 15 jours."
Autre précision: comment se matérialise l'information et la demande des enfants d'être entendus ?
L'information des enfants mineurs se fait par un formulaire pour chacun d'entre eux qui mentionne à la fois son droit d'être entendu et les conséquences sur les suites de la procédure et notamment le fait que la procédure deviendra alors judiciaire.
Un arrêté sera publié pour fixer un modèle de formulaire ( il faudra peut-être le traduire en langage grimaces et bébés pour les moins de 6 ans...).
Justement pour les enfants en bas âge: " si l'enfant n'a pas de discernement, ce que les parents titulaires de l'autorité parentale sont plus à même d'apprécier, et notamment lorsqu'il s'agit d'un enfant en bas âge, la convention doit indiquer que c'est pour cette raison que l'information n'a pas été donnée".
D'autres précisions sont données, nous vous renvoyons au communiqué.
Une précision importante sur le coût de cette nouvelle procédure et là Confrères avocats vous pouvez rire ou pleurer au choix, les notaires peuvent sortir les mouchoirs:
Le coût de la procédure de dépôt de la convention sera de 50 euros ( les notaires précisent que c'est du HT et qu'il s'ajoute en fait un droit d'enregistrement de l'ordre de 120 euros), rappelons que la justice était gratuite et que devant le juge les époux ne devaient pas régler 50 euros ou 180 euros !
Pour ce qui est du coût des avocats: " Si les avocats ont le rôle essentiel de s'assurer du consentement éclairé des époux, une seule convention doit être rédigée, les avocats ne seront par ailleurs plus contraintes par les délais de procédure et la présence à l'audience. cet allègement de leurs contraintes est de nature à leur permettre de proposer des honoraires plus réduits".
Rappelons à Monsieur le Ministre que lorsque nous soumettions une convention de divorce par consentement mutuel à l'homologation, il y avait déjà qu'une seule convention et non deux, comme c'est le cas pour ce nouveau divorce. En outre, si du temps va être gagné car nous n'aurons pas d'audience, du temps devra être consacré aux clients lors de plusieurs rendez-vous communs avec les deux époux et leurs conseils.
L'honoraire reste libre, il est fixé selon la difficulté du litige, la notoriété de l'avocat, la richesse du client...
Il est évident qu'un divorce par consentement mutuel sera moins onéreux qu'un divorce contentieux qui est plus long, cependant il ne sera pas gratuit non plus.
Les avocats ne seront pas maîtres des honoraires de leurs Confrères, ni du temps qu'ils consacreront à un divorce par consentement mutuel car très souvent les époux pensent qu'ils sont d'accord sur tout et lorsque l'on creuse, on remarque que non, que l'accord est plus qu'imparfait.